Hesperian Health Guides
Agir pour que ça change
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Voici l’histoire d’un groupe de femmes qui ont cherché les causes et des solutions à ces situations, en y faisant participer leur communauté.
Pendant la dernière saison des pluies, mon amie Ekwefi était enceinte. Mais, quand est venu le moment d’accoucher, son mari était loin, en voyage. Plusieurs femmes d’expérience sont venues pour l’aider. Mais le travail a duré trop longtemps et à un moment donné, Ekwefi a commencé à saigner. J’ai dit qu’il fallait l’amener au dispensaire. Personne n'a voulu prendre de décision, parce que son mari était loin et que c’est lui qui aurait dû décider. Au bout d’un moment, nous avons compris que ni Ekwefi, ni le bébé n’allaient survivre, et elles sont mortes toutes les deux sous nos yeux.
Ça m’a rendue très triste. C’était mon amie, et nous ne l’avons pas aidée. Je me suis mise à parler avec les autres femmes du village. Il fallait que nous fassions quelque chose devant ces problèmes. Chez nous, Ekwefi n’était pas la première femme à mourir en accouchant. Et beaucoup d’autres avaient perdu leur bébé à la naissance. Certaines ont dit que c’était comme ça, dans notre petit village, et qu’il fallait l’accepter. Mais nous, nous avons dit que non, et que nous pouvions faire quelque chose pour ne plus vivre ces situations.
Nous avons décidé d’avoir une réunion, pour voir si nous pouvions mieux comprendre le problème des femmes et des bébés qui mouraient à l’accouchement. Pendant la réunion, nous avons trouvé qu’il fallait commencer par parler avec des familles qui avaient déjà vécu ça. Six femmes du groupe ont rendu visite à des familles qui avaient perdu une femme pendant un accouchement difficile ces deux dernières années, ou à des familles où une femme était toujours en train de se remettre après un accouchement difficile.
Nous avons appris plusieurs choses importantes. Tout le monde a trouvé que le plus grand problème était que les femmes attendaient très longtemps avant d’appeler le docteur ou d’aller au dispensaire. Parfois la femme ne peut pas aller chercher de l’aide sans la permission du mari. Souvent aussi, comme avec mon amie Ekwefi, le mari n’est pas au village quand la femme a besoin de sa permission. Les voisins ont peur de faire quoi que ce soit, parce qu’ils ne veulent pas fâcher ou vexer le mari. Nous avons aussi vu que la plupart des maris ne se rendent pas compte de tous les risques qui existent pendant la phase de travail.
Nous avons fait à pied les 12 kilomètres qui séparent le village du dispensaire pour parler à la sage-femme. Nous lui avons raconté ce que nous venions d’apprendre, et demandé de nous aider à trouver des solutions. La sage-femme était très contente que nous soyons venues la trouver. Elle a parlé avec le chef de notre village et a demandé s’il était possible d’organiser une réunion avec les Aînés. Pendant la réunion, la sage-femme a parlé aux Aînés de tous les dangers qu’une phase de travail très longue peut poser . Elle leur a aussi parlé de ce que nous avions appris à propos des femmes du village qui mouraient en accouchant. Les Aînés ont dit qu’en effet, c’était un problème très sérieux pour tout le village. Ils ont demandé à la sage-femme si elle connaissait un moyen de le combattre. Elle leur a expliqué qu’en fait, ce problème ne touchait pas seulement notre village, mais beaucoup d’autres villages au Nigéria. Elle a proposé que le village choisisse 12 femmes et 12 hommes qui iraient suivre une formation de cinq jours sur la santé reproductrice et le planning familial. Ces personnes deviendraient des soignantes et des soignants en santé reproductrice, et sensibiliseraient le reste du village.
Après avoir suivi la formation, les hommes se sont rendu compte qu’il fallait qu’ils travaillent activement à résoudre un problème si grave. Ils ont décidé de faire tous les efforts possibles pour sensibiliser les autres hommes du village sur les risques que présente la phase de travail, et des façons d’aider les femmes en travail. Ils ont aussi décidé de créer un comité du transport, pour que les femmes puissent aller au dispensaire chaque fois que c’est nécessaire.
Nous nous sommes toutes et tous complètement impliqués dans la lutte contre ce grave problème dans le village. Au début, beaucoup de gens disaient qu’il arrive assez souvent que des femmes meurent en accouchant, et qu’on n’y pouvait rien. Mais nous ne nous sommes pas laissé décourager. Avec la participation des femmes, de la sage-femme, des Aînés et des hommes de la communauté, nous avons trouvé une solution qui est adaptée au cas de notre village. Et la réponse au problème ne nécessitait ni argent, ni nouvelle technologie. La réponse, c’était de donner notre temps et notre effort. Nous tous du village, nous vous conseillons de vous mettre ensemble pour essayer d’améliorer la vie et la santé des gens dans votre communauté.
Pour en savoir plus sur la façon de réfléchir et de chercher des réponses aux problèmes de santé, voyez le chapitre Résoudre les problèmes de santé.
Comment aider à sauver le plus de vies possibles chez les femmes enceintes :
La plupart des morts et des lésions dues à la grossesse et à l’accouchement pourraient être évitées si les femmes enceintes réussissaient à s’alimenter correctement, si leurs grossesses étaient plus espacées (avec le planning familial), si elles avaient accès à des avortements sécurisés, à des soins adéquats pendant la grossesse, à un système de transport valable, et à des services convenables de gestion du sang dans tout centre médical. Vous pouvez aider à changer les choses.
- Apprenez à reconnaître les signes de danger pendant la grossesse, l’accouchement, et après l’accouchement.
- Assurez-vous de moyens d’obtenir une assistance médicale avant que ce ne soit nécessaire.
- Essayez de vous organiser au sein de votre communauté pour qu’un système de transport d’urgence, de l’argent, et des dons de sang soient accessibles en cas d’accouchements difficiles.
- Organisez-vous avec les leaders locaux pour qu’on construise de petits logements près de l’hôpital, où les femmes qui habitent très loin pourront rester jusqu’à leur accouchement.
Les soignantes et soignants peuvent aider à préserver la vie de femmes et d'enfants :
- Offrez des services de planning familial qui aideraient à prévenir les avortements à risque et à espacer les naissances dans les familles.
- Offrez des services de prévention et de traitement des IST à toutes les femmes et les filles en âge d’avoir des enfants.
- Encouragez et facilitez l’usage de la capote et d’autres moyens de diminuer les risques pour la santé pendant les rapports sexuels.
- Fournissez des services de dépistage et de traitement du VIH, y compris des médicaments et d’autres types de soutien permettant de prévenir la transmission mère-enfant du VIH pendant la grossesse, l’accouchement, ou l’allaitement.
- Assurez-vous que toutes les femmes reçoivent des vaccins contre le tétanos.
- Apprenez à reconnaître les signes de danger pendant la grossesse et l’accouchement, et après l’accouchement.
- Orientez les femmes enceintes qui ont eu des problèmes pendant leur grossesse (actuelle, ou dans le passé) vers un centre de soins qui a un moyen de transport d’urgence.
- Indiquez aux accoucheuses, doulas ou sages-femmes les moyens de prévenir les infections, et de surveiller et traiter les signes de danger pendant la grossesse et l’accouchement.
- Encouragez toutes les femmes à allaiter pendant au moins 2 ans.
En savoir plus
Médicaments à mettre dans la trousse de médicament- Ayez une boîte de médicaments qui contient :
- de l’ocytocine, de l’ergométrine, du misoprostol, et des plantes médicinales qui empêchent ou diminuent les fortes pertes de sang après l’accouchement ;
- des antibiotiques pour traiter les infections ;
- le matériel nécessaire pour faire des injections dans le muscle (IM) et dans la veine (IV) ;
- les médicaments qui traitent l’éclampsie.
- des gants ou des sacs en plastique propres.
- des lames de rasoir neuves.
- des sacs ou boîtes avec tubes pour administrer des lavements ou des liquides par le rectum.