Hesperian Health Guides

CGF/E et les soins prénatals

Dans ce chapitre :

ATTENTION! Toutes les plaies doivent être complètement guéries avant que la femme n’ait des rapports sexuels. Cela permettra de prévenir les douleurs et l’infection, et de réduire le risque d’IST.

  • Si là où vous vivez, l’excision se fait le jour du mariage, aidez la communauté à comprendre que la plaie doit être complètement guérie avant que la femme n’ait des rapports sexuels pour la première fois.
  • Si là où vous vivez, c’est l’infibulation qui est pratiquée, aidez les hommes à comprendre que l’orifice vaginal doit être élargi avec précaution et douceur. Si on doit pratiquer une chirurgie pour l’ouvrir, il faut que cela se fasse bien avant que la femme ait ses premiers rapports sexuels, afin que la plaie guérisse complètement. L’intervention doit être faite par un agent de santé qui utilisera des instruments propres et appropriés pour l’incision, et qui soignera la plaie après pour prévenir une infection.
Tableau 1 :
Conséquences négatives des CGF/E sur la santé des femmes
Conséquences immédiates possibles Conséquences possibles plus tard et/ou à long terme Conséquences possibles à l’accouchement
  • Douleur extrême due à l’absence d’anesthésie
  • Choc
  • Hémorragie
  • Infection
— mauvaise cicatrisation des plaies
— septicémie ou tétanos
— de l’appareil urinaire
— autres maladies transmissibles par le sang
  • Rétention d’urine
— douleur
— infection
  • Lésions des organes contigus
— urètre
— vessie
— paroi vaginale
— périnée
— utérus
  • Lésions des nerfs sensoriels
  • Traumatisme
— souffrance physique extrême à la vue du sang
  • Plaies
  • Problèmes psychologiques
— manque de confiance envers ceux qui sont chargés de ses soins
— cauchemars
— manque de concentration
— perte de l’appétit ou perte de poids
  • Mort
— hémorragie
— infection
  • Mauvaise cicatrisation de la plaie
— cicatrices
— chéloïdes
— kystes dermoïdes
— rigidité de l’orifice vaginale
  • Infections locales et vaginales
  • Infections pelviennes répétées et infertilité
  • Rétention d’urine
— douleur
— infection
— lésions des reins
  • Rétrécissement de l’orifice vaginal
— règles douloureuses
— rétention du sang menstruel
— pénétration sexuelle impossible
Une chirurgie est parfois nécessaire pour évacuer le vieux sang menstruel et réparer la vulve.
  • Relations sexuelles douloureuses
— neurone clitoridien
— cicatrice
— chéloïdes
— rétrécissement de orifice vaginal
La chirurgie est parfois nécessaire pour permettre une vie sexuelle normale.
  • Les saignements dus à des traumatismes répétés peuvent causer une anémie
  • Risque accru d’IST
  • Fausses couches répétées
  • Infertilité
Il est rapporté que 20–25% du taux d’infertilité dans certains pays est dû à l’excision.
  • Séquelles psychologiques
— anxiété et dépression
— dysfonctionnement sexuel
— séparation/divorce et polygamie, selon certaines sources
  • Une cicatrisation excessive peut causer une obstruction à la progression du travail
  • Obstruction (fréquente) à la progression du travail à cause de la cicatrice
  • Déchirure sévère du tissu cicatriciel
— douleur extrême
— hémorragie
— infection
  • Une hémorragie due à un travail prolongé ou à une déchirure du tissu cicatriciel peut conduire à la mort de la mère
  • L’infection peut conduire à :
— des grossesses extra-utérines ultérieures
— l’infertilité
— le mort de la mère ou du bébé
  • Souffrance foetale due à un travail prolongé
— lésions cérébrales ou autres handicaps à vie
— décès du bébé
  • Chirurgie nécessaire
— épisiotomie large ou bilatérale (rare) pour assurer la survie du bébé
— césarienne pour sauver la mère et le bébé, avec les risques physiques, psychologiques et socio-économiques
  • Fistules vésico-vaginales ou rectovaginales
— incontinence fécale ou incontinence urinaire
— divorce
— exclusion sociale
  • Cicatrices, chéloïdes, kystes dermoïdes et lésions vaginales après l’accouchement
— relations sexuelles douloureuses
— complications aux accouchements ultérieures
  • Problèmes psychologiques après les complications à l’accouchement
— anxiété et dépression
— dysfonctionnement sexuel
— absence d’harmonie conjugale
— divorce
— exclusion sociale
  • Mort de la mère ou du bébé

Soutien psycho-social et soins de santé

Les sages-femmes ont un rôle important à jouer, en informant les gens sur la santé, en promouvant la santé, et en apportant un soutien psycho-social aux femmes. Les femmes ont peut-être peu d’opportunités culturellement appropriées pour exprimer leurs préoccupations, et les visites prénatales peuvent offrir une telle occasion. Les visites prénatales offrent aux sages-femmes la possibilité d’instaurer la confiance dans le système des soins de santé, d’encourager la bonne santé prénatale, de planifier l’accouchement, et de sensibiliser la femme aux problèmes des CGF/E.

Les femmes ont peut-être besoin d’un soutien sur plusieurs questions psycho-sociales ou de santé liées aux CGF/E. Pour aborder de manière efficace les questions sensibles des femmes excisées, il faut prendre le temps de développer des relations de confiance. Certaines femmes n’ont peut-être pas d’inquiétudes, d’autres ne peuvent pas discuter de leurs préoccupations, et d’autres encore peuvent réprimer leurs sentiments. Dans une relation d’entraide et de confiance, on peut encourager les femmes à parler de leurs questionnements.

L’expression « coupures génitales féminines » peut être offensante, et des mesures spéciales devraient être prises pour connaître les termes utilisés par les femmes et leurs familles. Demander à une femme les termes qu’elle utilise pour décrire les CGF/E peut rendre la rendre plus à l’aise pour converser. S’il est nécessaire d’introduire soi-même une terminologie, suggérez des termes tels que : excision, coupures génitales, ou coupures traditionnelles ou rituelles. Le terme familier « circoncision féminine », peut faciliter la communication.

Outre les difficultés habituelles rencontrées par les femmes pendant la grossesse, les femmes qui ont subi une mutilation génitale ont peut-être des besoins et des problèmes particuliers. Les problèmes qui résultent des CGF/E peuvent ne pas être perçus comme associés à la pratique, et cette relation a besoin d’être expliquée. Lorsqu’on discute des infections de toute sorte, des précautions doivent être prises pour éviter des termes qui sous-entendent l’impureté ou les conditions d’hygiène déplorables. Ces termes peuvent être offensants et prêter à confusion, car les mutilations génitales sont censées améliorer l’hygiène et la propreté.

Les infections urinaires peuvent être causées par la rétention d’urine due à des cicatrices ou à d’autres lésions de l’appareil urinaire provoquées par les CGF/E. Si l’infection urinaire se reproduit, en dépit du traitement antibiotique, il serait approprié de s’adresser à un médecin pour un examen médical.

Les femmes ayant subi des dommages causés par les CGF/E sont plus à risque d’IST. Les infections pelviennes peuvent être aggravées ou difficiles à traiter à cause du rétrécissement de l’ouverture vaginale ou des cicatrices. Pour traiter efficacement les infections vaginales, il est essentiel que le partenaire sexuel et toutes les coépouses soient traitées en même temps que la femme enceinte.

Les soins qui entourent les examens et l’attention qu’on porte à l’inconfort d’une femme sont importants pour développer une relation efficace. Si les examens pelviens sont pénibles à cause d’une cicatrisation excessive ou interne, ou à cause des lésions des nerfs, un spéculum de petite dimension pourrait convenir, sinon l’examen vaginal doit se faire avec un seul doigt. Dans le cas d’une infibulation, l’orifice vaginal de certaines femmes doit être ré-ouvert, pour qu’on leur dispense des soins appropriés.

Deux sujets sensibles peuvent être soulevés au cours des soins prénatals, quand une femme est en confiance : ses règles mensuelles et ses problèmes sexuels. La sage-femme est dans une position idéale pour lui donner des conseils sur ces difficultés.

L’écoulement des règles mensuelles peut être bloqué par un orifice vaginal qui est trop petit à cause de l’infibulation ou de la cicatrice interne. Cela peut provoquer des règles très douloureuses, ou des règles longues et/ou abondantes. Conseillez à la femme d’appliquer des compresses chaudes sur son bas-ventre. Si les problèmes sont graves, l’ouverture vaginale devra être élargie. Cela peut être abordé dans le cadre du plan d’accouchement de la femme.

Si une femme n’a pas de problèmes de santé liés à l’excision, elle est en mesure de ressentir le plaisir sexuel. Mais de nombreuses femmes excisées, en particulier celles qui ont été infibulées, ont des difficultés à avoir des rapports sexuels. Douleur ou sensibilité, manque de désir, absence de sensation et vaginisme sont certaines des conséquences des excisions. La chirurgie n’est pas toujours nécessaire et peut ne pas résoudre les problèmes. Là où le counseling est culturellement accepté, les couples peuvent profiter des conseils sur les relations sexuelles. Une femme peut discuter avec son partenaire de la manière de devenir plus excitée sexuellement. Elle pourrait expliquer qu’elle a besoin davantage de temps pour se sentir excitée. Elle peut parler des méthodes qui rendent les rapports sexuels moins douloureux. Les partenaires doivent savoir que si le vagin de la femme est assez humide (lubrification), les rapports sexuels deviennent plus sûrs et plus confortables.

Plan pour l’accouchement

Les femmes qui ont subi des CGF/E ont des désirs d’accouchement comme les autres femmes. Le plus souvent, elles ne s’attendent pas à ce que l’excision rende leur accouchement plus difficile. Même si c’est effectivement le cas pour certaines, les femmes enceintes ont besoin d’informations sur la manière dont l’excision peut affecter le processus de l’accouchement.

Chaque femme doit être examinée individuellement pour vérifier l’ampleur de la coupure génitale. L’obstruction à la progression du travail est due davantage à une conséquence de l’infibulation, mais peut être également un problème provoqué par une cicatrice grave résultant de certains procédés de type II. Si la femme rencontre des difficultés ou si l’orifice du vagin doit être élargi, la sage-femme devra lui expliquer cela de manière subtile et l’aider à planifier à l’avance les soins nécessaires.

Dans le cas de l’infibulation, de nombreuses femmes peuvent avoir une vision culturelle de la période où cette infibulation doit être ouverte. Certaines seront prêtes à accepter que cela se fasse dans le deuxième trimestre (désinfibulation planifiée), d’autres s’attendent à ce que cela se produise pendant l’accouchement. Il est avantageux d’encourager la désinfibulation au cours de la période prénatale, parce que cela permet de réduire bon nombre de complications au début du travail, liées au rétrécissement de l’orifice vaginal. La désinfibulation est une intervention chirurgicale mineure mais qui ne doit être effectuée que par un personnel qualifié. Élaborez un plan pour la désinfibulation selon la volonté de la femme.

Les attentes de la femme par rapport à la re-suture doivent également être discutées durant la période prénatale. Sa famille ou elle peuvent s’attendre à ce qu’après l’accouchement, la vulve se referme au même degré qu’elle était avant l’accouchement. La re-suture à ce degré est un risque pour la santé, et devrait être découragée. Il est recommandé que le mari soit impliqué dans cette discussion, parce que ses désirs orientent souvent la décision de la femme. Le counseling avant l’accouchement a montré qu’il contribue à réduire le nombre de couples qui veulent que la femme subisse une re-suture au même degré que la première. L’aspect des organes génitaux, la nécessité de recoudre la vulve de manière très soignée, sont des questions très importantes pour la femme et doivent faire partie de cette discussion.

La possibilité d’une naissance par césarienne doit être discutée, y compris les raisons et les risques possibles. La signification culturelle et/ou sociale de la césarienne, les sentiments de la femme quant à la naissance par césarienne, les avantages d’une césarienne qui peut sauver la vie, aussi bien que les risques médicaux possibles, doivent être abordés.

Ceci pourrait atténuer le traumatisme en cas de césarienne urgente. Dans les rares cas où une épisiotomie n’est pas possible à cause d’une cicatrice étendue, la femme doit être envoyée à l’hôpital pour avoir une césarienne planifiée. Si la femme comprend et accepte les raisons de la naissance par césarienne, elle peut encore vouloirattendre que le travail commence avant de se faire opérer. Sa décision doit être respectée.

La sensibilisation sur les CGF/E

La consultation prénatale offre une occasion idéale pour sensibiliser les femmes à la question des CGF/E. Souvent, les problèmes de santé engendrés par cette pratique n’y sont pas associés dans l’esprit des femmes, et cette association peut leur être expliquée. Dans un environnement de prise en charge et de confiance, les femmes excisées peuvent être encouragées à soulever et à discuter de leurs préoccupations.

Les femmes enceintes pourraient recevoir des informations sur la façon dont les mutilations génitales risquent d’affecter le processus de l’accouchement. La visite prénatale peut être un moment privilégié pour soulever des questions au sujet des CGF/E si l’enfant doit être une fille.



Cette page a été mise à jour : 05 janv. 2024