Hesperian Health Guides

Les obstacles à la santé mentale

Dans ce chapitre :

Le stress, la discrimination, l’isolement, et les évènements traumatisants constituent quelques obstacles à la santé mentale que les femmes vivant avec un handicap rencontrent. Bien sûr, ce ne sont pas toutes celles qui rencontrent ces problèmes qui développent des problèmes de santé mentale. Le stress par exemple n’est pas une maladie mentale bien que l’excès de stress peu constituer un problème lorsque vous n’arrivez plus à faire face aux obstacles que vous rencontrez. Les évènements traumatisants dans votre vie ne provoquent pas toujours des problèmes de santé mentale, mais si vous n’avez pas de soutien pendant la période où vous tentez de les comprendre et de les assumer émotionnellement, cela peut arriver.

En pensant aux troubles mentaux, souvenez-vous que :

  • Il n’y a pas une ligne claire entre les réactions normales aux évènements de la vie et les problèmes de santé mentale.
  • La plupart des gens présentent certains signes décrits dans ce chapitre à différentes périodes de leur vie parce que chacun rencontre des problèmes d’un moment à l’autre.
  • Les signes des troubles mentaux peuvent varier selon les communautés. Un comportement qui semble bizarre à un étranger peut être considéré comme normal selon les traditions et les valeurs d’une autre communauté.

Si vous pensez qu’une personne a un problème de santé mentale

une femme assise la tête baissée, l’air troublé.

Si vous soupçonnez une personne d’avoir un problème de santé mentale, cherchez à mieux la connaître. Ecoutez ce que les autres disent à propos de son comportement et la manière dont elle a changé. Puisque les troubles mentaux trouvent leurs racines dans la famille ou dans la communauté, pensez à la manière dont ces facteurs peuvent contribuer à occasionner le problème. Cependant, ce ne sont pas toutes les maladies mentales qui ont des causes identifiées. Souvent, on ne connait simplement pas la raison pour laquelle une personne développe des troubles mentaux.

une femme âgée qui a l’air inquiète et pensive.
Est-ce que je souffre vraiment de troubles
nerveux ?
Il se peut que vous vous sentiez faible ou malade. Cependant, le vrai problème peut être quelque chose d’injuste ou de mal dans la vie.

LE STRESS

Lorsque vous êtes beaucoup stressée chaque jour et sur une longue période, vous pouvez vous sentir submergée et incapable de vous en sortir. Le problème peut s’aggraver si l’on vous a appris à ne pas vous mettre en valeur et à négliger vos propres besoins.

Changements physiques et maladies dus au stress

Lorsque vous êtes stressée, votre corps se prépare à réagir rapidement et à repousser le stress. Certains changements qui s’opèrent sont :

  • Le cœur commence à battre plus rapidement.
  • La pression artérielle augmente.
  • La personne respire plus rapidement.
  • La digestion ralentit.


Lorsque le stress est soudain et sévère, vous pouvez sentir ces changements dans votre corps. Ensuite une fois le stress parti, votre corps retourne à la normale. Cependant, lorsque le stress est peu sévère et apparait lentement, vous pouvez ne pas remarquer combien il affecte votre corps bien que les signes soient toujours là.

Le stress qui continue pendant une longue durée peut mener aux signes physiques fréquents de l’anxiété et la dépression, tels que les maux de tête, les problèmes intestinaux et le manque d’énergie.

Les barrières sociales occasionnent le stress

Les mêmes barrières qui empêchent les femmes vivant avec un handicap d’avoir des soins médicaux provoquent également le stress dans leur vie quotidienne. Etant donné qu’elles rencontrent plusieurs sources de stress, il est particulièrement important que les femmes vivant avec un handicap de trouver le soutien dont elles ont besoin pour se sentir fortes et confiantes en leurs capacités, et de maintenir leur estime de soi.

une fille qui a un seul bras valide pour travailler à la maison tandis que deux garçons vont à l’école.
Ce n’est pas juste. Ils ont la chance d’aller à l’école et moi je dois rester à la maison pour
travailler.
Le genre

Le genre est la manière dont une communauté définit ce que c’est que d’être un homme ou une femme. Dans les communautés qui ne valorisent pas les filles autant que les garçons, les filles subissent plus de stress. Vos frères peuvent bénéficier d’une meilleure éducation ou de plus de nourriture. Vous pouvez être beaucoup critiquée et on peut ne pas remarquer vos efforts. Une fille vivant avec un handicap est plus sujette à être traitée de la sorte qu’une fille qui ne souffre pas de handicap ou un garçon handicapé. En grandissant, il peut vous arriver de croire que vous ne méritez pas d’être bien traitée par votre partenaire et votre famille, de bénéficier de soins médicaux lorsque vous êtes malade ou de développer vos compétences. Lorsque vous êtes dans cette situation, votre famille peut penser que votre très faible importance dans la famille et dans la communauté est naturelle et juste – pourtant en réalité cela est injuste.

La pauvreté

Lorsqu’une famille est pauvre, il est plus difficile pour une fille ou une femme handicapée d’avoir les compétences dont elle a besoin pour travailler. Elle pourrait ne pas avoir la prothèse auditive ou les béquilles dont elle a besoin pour aller à l’école. Si une fille ou une femme handicapée n’a pas la chance de contribuer à soutenir la famille, elle peut être traitée comme un fardeau. Si la famille ne dispose pas d’assez de nourriture, elle peut décider de donner une grande partie aux membres qui travaillent pour la soutenir.

Les attitudes face au handicap
une femme qui utilise le langage de signes.
Lorsque vous grandissez et que vous êtes entourée de personnes qui vous aiment mais qui croient que vous n’êtes pas capable de faire beaucoup de choses, vous commencez vous aussi à croire en cela. Le fait que les personnes que vous aimez vous demandent très peu de services peut blesser vos sentiments envers vous-même.

Les communautés peuvent aussi avoir des faibles attentes par rapport aux choses que les filles ou les femmes vivant avec un handicap sont en mesure de faire. Ayant appris qu’elles ont très peu de choses sur lesquelles espérer, les femmes vivant avec un handicap ont très peu tendance à se valoriser. Elles manquent souvent de confiance en soi pour plaider pour un changement au sein de la communauté.

La discrimination, le stress, et l’estime de soi

Notre association a été créée en 1989 par des femmes vivant avec un handicap afin de promouvoir le bien-être de la femme vivant avec un handicap. Nous sommes 21 membres avec des handicaps divers (visuel, auditif, et physique, et difficulté à parler). Nous nous rencontrons une fois par mois pour parler de nos problèmes et essayer de trouver des solutions.

un groupe de femmes vivant avec un handicap en discussion.


Nous acceptons toutes que les femmes vivant avec un handicap sont souvent victimes de discrimination, parce que :

  • nous sommes des femmes ;
  • nous sommes handicapées ; et
  • nous sommes pauvres pour la plupart.


Nous sommes rejetées comme partenaires convenables de mariage ou comme la « mauvaise » image au travail. Les filles et les femmes vivant avec un handicap n’ont pas souvent la possibilité d’aller à l’école même lorsque celle-ci est accessible. Par exemple, même dans les écoles spéciales pour les enfants vivant avec un handicap, les garçons sont généralement privilégiés.

Nous avons peu de chances de bénéficier d’une formation afin de trouver un emploi. Nous subissons des abus physiques, émotionnels et sexuels. Contrairement aux hommes et les femmes qui ne souffrent pas de handicap, nous avons rarement l’opportunité de prendre des décisions à la maison et dans la communauté.

Cependant, pour chacune de nous dans l’association, le problème majeur est le manque d’estime de soi. La société nous enseigne à ne pas nous valoriser. Nous sommes généralement considérées comme incapables de prendre soin d’un homme, d’avoir des enfants et de faire des travaux utiles. Nous sommes alors considérées sans valeur. Même nos familles élargies ont besoin de nous uniquement lorsque nous nous montrons très utiles envers elles.


—Dormaa Ahenkro, Ghana


L’image du corps
une femme tenant une béquille, qui parle.
Quand je m’habille bien avec un sari assorti d’une blouse, avec des bracelets assortis et un bindi (marque traditionnelle en Inde) sur le front, je me sens bien et j’ai plus confiance en moi.

La communauté peut considérer les femmes handicapées comme moins importantes que les autres femmes parce qu’elles ne correspondent pas à l’image d’une belle femme selon cette communauté. Cependant, les femmes vivant avec un handicap voient une grande diversité de corps et de comportements autour d’elles et sont conscientes de ces différences. Il peut leur arriver aussi de se sentir belles, bien habillées, capables et fortes même avec leurs cicatrices, leurs difformités, leurs amputations, leurs prothèses auditives, leurs expressions et gestes inhabituels, leurs fauteuils roulants, leurs béquilles, leurs bâtons, leurs cannes, ou la possibilité d’avoir des attaques (crises) ou faire des selles et d’uriner en public.

Comment j’ai changé mon image
une jeune femme aveugle nommée Rose avec des cheveux tressés et habillée comme une enfant.

Je me nomme Rose et je viens du Kenya. Je suis aveugle et il y a plusieurs des membres de ma famille et des amies qui m’aident à m’occuper de moi au quotidien. J’apprécie beaucoup leur aide, cependant j’étais aussi frustrée parce que je ne pouvais pas trop contrôler la manière dont je suis habillée, ou la manière dont les choses étaient faites. J’avais l’impression d’être tout le temps traitée comme une enfant parce que personne ne semblait me traiter avec respect.

Je voulais me sentir plus indépendante alors j’ai commencé à poser des questions. Lorsque quelqu’un m’aidait à m’habiller, je demandais à quoi ressemblaient mes habits et comment mes cheveux étaient tressés. Je demandais aussi comment les autres femmes de mon âge s’habillaient et se coiffaient.

Rose portant des vêtements et une coiffure de femme avec un foulard.


Je me suis vite rendue compte que je finissais par ressembler à une enfant lorsque les aides-soignants m’habillaient et me coiffaient. Il n’est pas étonnant que je ne sois pas traitée avec respect. Pourtant, je suis une adulte de 25 ans et je n’aimerais pas être traitée comme une enfant. Alors j’ai demandé à mes aides-soignants de m’apprendre à faire moi-même mes cheveux comme le faisaient les autres femmes de la communauté. Elles étaient contentes de le faire. Elles n’y avaient jamais pensé auparavant. Comme elles avaient l’habitude de faire les cheveux de leurs filles, elles m’ont aidé de la même manière. Maintenant, mes amies m’aident à m’habiller comme les autres femmes de la communauté et les autres personnes de la communauté me traitent avec respect.

L’isolement

Les filles handicapées pourraient vivre à l’écart des autres enfants et ne pas avoir la chance de nouer des amitiés. Elles pourraient ne pas apprendre les valeurs sociales dont elles ont besoin pour bâtir des relations fortes en tant qu’adultes. Le fait d’être seules et isolées peut occasionner le stress. Il est important d’avoir des amis et de faire partie de la communauté pour développer une bonne estime de soi.

une femme dans un fauteuil roulant, qui travaille avec un ordinateur.

Une adolescente qui souffre d’un handicap a aussi besoin de soutien pour développer de la confiance en rapport avec sa sexualité afin de pouvoir bâtir des relations personnelles et intimes.

Les compétences professionnelles

Les femmes vivant avec un handicap ont moins de chance d’être formées pour l’emploi et ainsi de gagner de l’argent. Si elles n’ont pas la chance d’acquérir des compétences professionnelles, il devient plus difficile de se prendre en charge et de soutenir leurs familles.


Cette page a été mise à jour : 29 janv. 2024